L’art délicat de l’unschooling à temps partiel

Si j’avais suivi mes inspirations profondes, et non les diktats et pressions de la société (tout le monde fait comme ça, on suit le mouvement, point barre), j’aurais choisi de pratiquer l’unschooling* pour toute ma tribu.

Les années passant, j’ai constaté comment la scolarisation en établissement peut annihiler l’enthousiasme, la création et les apprentissages spontanés de l’enfant. Mes différentes expériences – professionnelles et personnelles, ont éclairé et enrichi ma réflexion éducative et j’assiste, souvent frustrée, au cloisonnement de la personnalité de nos enfants.

Bon, mes enfants scolarisés sont, la plupart du temps, heureux et épanouis dans leurs établissements respectifs, et j’en mesure les bienfaits (entre deux récriminations contre ce système étriqué et restrictif ahem). Je ne parle pas là de bienfaits au niveau des acquisitions dites « scolaires » mais plutôt au niveau des échanges sociaux, de l’apprentissage de la communication entre pairs, bien qu’évidemment tout ceci se rencontre aisément dans notre vie au quotidien.

Mais voilà, notre vie s’est ainsi mise en place, et on s’en satisfait pas trop mal.

Sauf pour Perle. Ma douce, ma tendre aura toujours bataillé pour s’insérer dans la petite case sociétale qui lui est dévolue, sans jamais y parvenir.

Au sein de la fratrie déjà, quant elle se faisait oublier au lieu de prendre sa place. Discrète, silencieuse et observatrice, il lui aura fallu presque 14 ans pour parvenir à communiquer « d’égale à égale » avec ses sœurs, même si cela reste fragile, et que bien souvent, elle s’efface. Avec son frère, cela a été totalement différent, du fait de sa présence régulière à la maison, Perle et Fiston ont un lien fusionnel et quasi gémellaire.

Au sein de l’école, très vite, quand les professionnels l’ont forcée à rentrer dans le moule, l’ont critiquée, brimée, blessée.

Et de ce fait, au sein de la société, que Perle a pris en horreur, terrifiée par les adultes, puis les adolescents, jusqu’aux petits enfants qui la mettent mal à l’aise et en situation d’angoisse.

Et c’est ainsi que nous avons été broyés par les rouages de ce système, confrontés à la pression des professionnels pour la « soigner », errant d’instances en instances, de prises en charge médicales aux suivis pédo-psychiatriques.

Et que nous avons piétiné l’enthousiasme et la liberté d’être de notre fille. Réduite à une étiquette, imposante et tenace, d’enfant « à problèmes », « inadaptée », « handicapée ».

Je ne culpabilise pas (bon, un peu, mais j’y travaille), car nous avons toujours agi « pour elle », « dans son intérêt ».

Je sais maintenant que nous aurions dû freiner des quatre fers. Que nous aurions dû tout simplement proposer à notre enfant un environnement sain et adapté à son évolution. Que ce soit l’unschooling, les structures de pédagogies Montessori, Freinet ou que sais-je encore, des alternatives au système scolaire classique étaient possibles.

Mais on ne peut malheureusement pas effacer toutes ces années d’errance et nous devons continuer à avancer, à l’accompagner dans son cheminement.

Et aujourd’hui, ce qu’il lui faut, c’est prendre son temps. Observer, réfléchir, expérimenter tout ce qui lui fait envie, lui correspond, l’intéresse, la questionne. Que ce soit apprendre la fabrication d’un fromage de chèvre (merci Nathalie !), la construction d’une cabane, la pratique du football féminin, l’élevage caprin, et tellement d’autres domaines.
Vient alors l’art délicat de concilier ses besoins à notre rythme de vie, cadré par des horaires d’école, de travail, d’activités périscolaires, de trajets stage/école/job d’étudiants liés à la scolarisation de nos autres enfants.

En effet, ce n’est pas évident d’accompagner Perle dans ses découvertes, quand il faut sans cesse tout laisser en plan pour aller récupérer Fiston, le faire manger, repartir, et ainsi de suite pour lui et les autres. Ce n’est pas compatible avec par exemple, une expédition en forêt, la visite d’un musée (tout est à au moins 30 km d’ici), ou la mise en place d’une activité type lapbook ou autre recherche….

Et me voici frustrée, coincée, entre l’envie de suivre les aspirations de Perle, et mes multiples obligations de mère auprès de mes autres enfants.

Alors aujourd’hui, on pratique l’unschooling à temps partiel, en attendant mieux.

NDLR : sinon au moment où j’allais publier ce billet, Perle s’est entaillée sérieusement l’index (en préparant le gratin dauphinois pour le repas) et part en urgence à l’hôpital avec son Papa. 

NDLR2 : bilan de l’accident : Perle a donc interdiction de bouger la main jusqu’à la cicatrisation. Elle est ravie d’échapper ainsi aux activités formelles (dictées, exos divers), mais très déçue car cette immobilisation la prive également de football… A suivre.

 

*unschooling : c’est instruire nos enfants de façon non dirigée, suivant leurs évolutions, aspirations, choix d’apprentissage. Ici, je mixte entre les programmes officiels correspondant aux besoins de Perle (enseignement technique agricole),  des supports formels (pour les notions indispensables comme les bases opératoires, l’orthographe etc), et les découvertes au quotidien suivant sa demande (jardinage, visites de lieu, découverte d’exploitation agricole, cuisine, couture et tellement d’autres choses)

 

Nos enfants grandissent, leur besoin d’autonomie aussi.

Mes p'tits oisillons tous mignons !!

Mes p’tits oisillons tous mignons !!

Aujourd’hui, je vous propose d’aborder un thème souvent sujet à polémique : l’autonomie de nos enfants.

Dès la naissance de nos chérubins, nous sommes abreuvés, harcelés de bons conseils à ce sujet.
Laisse le pleurer, ne le porte pas trop, il va être collé à tes basques, tu vas en faire un capricieux, un incapable etc, etc….

Et comme vous le savez, je suis une mère fusionnelle, qui a pratiqué le portage physiologique et le co-dodo en intensif (Fiston dort encore régulièrement avec nous).
Mes bras n’ont jamais été aussi heureux qu’emplis d’enfants et je pleure à chaque rentrée scolaire.

Mais cela ne m’a pas empêchée d’encourager, voir favoriser l’autonomie de mes enfants.
Dès leur plus jeune âge, je les ai laissés libres de faire leurs propres découvertes et expériences, comme utiliser des couverts « de grand » avant leurs 12 mois (et même un couteau à steak), grimper dans les arbres, manipuler outils et autres appareils dit d’adulte.
Ou alors, rentrer seuls de l’école, aller à la boulangerie, partir en vacances avec leur grand-mère ou séjourner chez des copains dès la maternelle (bon ok, j’avoue avoir verser toutes les larmes de mon corps en leur absence, fusionnelle je vous dis!)

Tout est question de confiance. J’ai confiance en leurs capacités d’apprentissage, en leur volonté de faire seul, leur soif de liberté.

Mais, car il y a un mais, cette confiance, ce laxisme diront certains (oh, j’en ai entendu, des commérages et des critiques!) m’est facile et naturel jusqu’à un certain point.
Tant qu’il s’agit de laisser mon petit de 2 ans bricoler avec le tournevis ou laisser Championne choisir ses tenues (et pourtant, là, il en faut du lâcher-prise, vu ses goûts vestimentaires!), je le fais avec plaisir.

Seulement, mes enfants grandissent (bien trop vite à mon goût, d’ailleurs). Et leur besoin d’autonomie et d’indépendance croît avec eux.

Vous voyez où je veux en venir ? A mes ado, bien entendu.
Je ne sais pas si, l’âge avançant, je me fais plus inquiète, stressée, ou si peut-être les médias et la sur-information dont ils nous abreuvent quotidiennement génèrent en moi des peurs nouvelles, mais j’avoue que ces derniers temps, je m’interroge beaucoup.

Car la liberté que je leur laissais il y a quelques années n’est pas celle qu’elles réclament aujourd’hui. Séjourner un week-end chez des ami.e.s n’a plus la même définition.

J’ai un exemple tout frais : ce soir, Deuz ne rentre pas à la maison après sa journée de cours. Elle est invitée à dormir chez une amie. Que je connais bien entendu et dont je connais les parents, Deuz a déjà séjourné chez eux et vice-versa.

Seulement, autant il y a quelques années, Deuz et ses copines se contentaient de jouer et papoter en toute sécurité, sous la surveillance bienveillante des parents, autant aujourd’hui, je sais que leurs divertissements sont tout autre.
Comme se balader dans les rues du village, en bande, gloussantes et ricanantes, en quête éventuelle d’un autre groupe de jeunes.
Comme passer des heures à se photographier (Ah, la mode des selfies et des duck-face!) et publier en rafale ces clichés sur les réseaux sociaux, à grand renfort de « J’aime », « Tro tro belle !! » et autres « Tro cool cette soirée avec mes Bestaaaahhh !! »….LOL…ou pas.

Car me viennent en tête tous les dangers auxquels sont exposés nos adolescents : la cigarette, l’alcool, les mauvaises rencontres et j’en passe.

Et c’est là qu’entre en jeu la Confiance.
Sans m’en rendre compte, par envie de partage, j’ai toujours, dès leur plus jeune âge, permis, encouragé mes enfants à parler, se confier, m’interroger sur tous les sujets qui les questionnent. Aucun tabou à la maison, en tout cas avec moi, leur père étant moins à l’aise quand il s’agit de discuter.
J’ai toujours répondu du mieux que je pouvais, sans fioritures. J’ai même provoqué des discussions, des débats (parfois houleux) sur des thématiques qu’il me semblait important d’aborder.
Que ce soit la sexualité, la contraception, l’avortement, l’homosexualité ou les impôts (oui, Prems panique beaucoup à l’idée de devoir remplir une déclaration d’impôts, un jour!), nous parlons de tout, constamment, beaucoup.

Mais bien que la communication règne en maître sous notre toit, je sais, par expérience, et je le constate jour après jour, que l’adolescent a un jardin secret bien gardé.
Ce qui est naturel, bien entendu. Je suis fusionnelle certes, mais je respecte tout à fait leur vie privée.

Seulement, il me vient à paniquer à l’idée que je ne connais pas si bien que ça mes filles, en fait. Que peut-être, elles ont une personnalité différente lorsqu’elles sont à l’extérieur. Sûrement, d’ailleurs. Mais jusqu’à quel point ?

Comment savoir où se situent leurs limites entre l’indépendance et la mise en danger ?
Comment les protéger sans les fliquer ?

Je n’ai pas de réponses. Je tâtonne, j’y vais à reculons parfois, de peur de les braquer et de rompre leur envie de se confier.

Ce matin, j’ai seulement dit à Deuz de m’envoyer un SMS lorsqu’elle arrivera chez son amie, alors que je brûlais d’envie de la submerger de consignes/mises en garde : ne parle pas aux étrangers, ne te maquille pas trop, fais attention à tes postures, appelle-moi !!! Dis-moi tout !!!

Non, surtout pas. Je vais verrouiller très fort la serrure sur mes angoisses et patienter, attendre qu’elle veuille bien, ou pas, me raconter un peu.

Les laisser prendre leur envol, quand l’immensité leur tend les bras.

Et vous, quelle est votre position face au besoin d’indépendance de vo(s)tre adolescent(s) ?

 

Il est des signes qui ne trompent pas.

Ce soir, je regardais mon fils. Mon ToutPetit. Il jouait avec ses sœurs, à faire le zouave comme il le fait si bien.

Et, au lieu de m’en amuser, de ricaner comme à l’accoutumée devant ses facéties, j’ai senti un grand vide.

Car il est des signes qui ne trompent pas.

Il a grandi. Il a pris son envol.

Je devrais m’en réjouir, tellement ses premières années de vie ont été chaotiques et difficiles à vivre pour moi.

Attachés l’un à l’autre. Collés serrés, fusionnés. Des heures d’insomnie à tenter de l’apaiser. Des milliers de tétées pour enfin le combler. Des pleurs. Mes pleurs, face à ce petit être dévoreur d’énergie. Ses pleurs.

Et, sans que je ne m’en aperçoive, mon ToutPetit, mon bout de moi s’est détaché.

Quand il évolue vite, très vite. Quand il rattrape ces 5 premières années où il ne vivait qu’à travers moi.

Quand il réclame sa part de lionceau dans ma Tribu, quand il s’impose, dispose.

Quand il se débrouille seul. Qu’il le revendique même, ce savoir-faire seul.

Il est des signes qui ne trompent pas.

Quand il s’endort seul, depuis longtemps déjà. Quand il câline sa soeur plutôt que que moi. Quand je m’aperçois que la journée a coulé sans qu’une seule fois je l’ai pris dans mes bras.

Il est des signes qui ne trompent pas. Mais qui font mal, là, tout bas.

Attachés l’un à l’autre. Collés serrés, fusionnés.

Comme il est amer, ce goût d’indépendance, mon Fils.

Comme il est douloureux, ce deuil.

Il est des signes qui ne trompent pas.

Mon Fils, mon grand bonhomme, au sourire renversant et au sourire charmant. Je vais te regarder grandir, encore et toujours. T’aimer plus fort que tout.

Mon ToutPetit, mon Dernier, j’ai gravé au fond de moi chacun de tes mouvements esquissés dans mon ventre, chaque douleur préparant ta venue au monde. Je garde en mémoire chaque pli de ton cou. Ma main peut tracer dans l’air les courbes de ton corps, de ton dos tout doux tout chaud, que j’ai tant caressé, dans l’espoir de te calmer. Je me souviens de chaque tétée partagée, de mon lait, de mon âme qui coule de mon cœur au tien. Je sens encore ton corps contre le mien, ta petite main serrée dans mon cou.

Presque 3 ans de lien lacté ♥

Presque 3 ans de lien lacté ♥

Il est des signes qui ne trompent pas.

Mon Fils, ma Terreur, tu es grand. Et tu vas devenir plus grand encore. Fort comme un homme. Beau comme un Dieu.

Mon Fils, ma fierté ♥

Mon Fils, ma fierté ♥

Mais tout au fond de moi reste figée l’image de mon nouveau-né. Mon dernier. Pour l’éternité.