La leçon (ou comment ma fille m’apprend sa liberté)

liberté

Je suis Charlie. Mais je ne sais pas dessiner. Je n’ai pas su écrire non plus, cette semaine. Pas le goût, pas les mots, trop à dire mais sans envie. D’autres l’ont fait tellement mieux, dans l’émotion, dans le cynisme, dans les rires, dans les larmes. Libres.

Je suis Charlie. Je me suis levée. J’ai prié, moi l’athée. J’ai communié. J’ai fait silence. J’ai informé.
Mes enfants. Qui n’ont pas bien compris pour la plupart. Mais qui ont ressenti mon émotion, ma peine.

Sauf une. Qui s’est rebellé. Prem’s n’était pas à la maison cette semaine mais à l’internat. Nous ne communiquons pas durant ces semaines loin de nous, sauf urgence vitale (j’ai plus de déo, je finis plus tôt etc…)
Nous n’avons donc pas parlé des « événements » ensemble avant son retour, ce soir.

Elle est rentrée alors que j’étais absente. Elle m’a, comme à chacun de ses retours, sauté au cou lorsque je suis revenue. Et je l’ai gentiment envoyée bouler. Parce que j’étais déjà toute entière tournée vers l’actualité. Le dénouement des prises d’otages. La fin de cette attente cauchemardesque.

Et elle qui voulait me raconter ses événements à elle, sa semaine, ses anecdotes, son plaisir d’être enfin à la maison. Je ne l’ai pas écoutée.

Mais plus tard, à table, j’ai posé des questions. J’ai voulu savoir. Pourquoi, comment. Mais toujours pas écouté. Je me suis indignée du peu de réactions dans son école.

Et elle s’est rebellée. A tempêté, a crié, a pleuré.

J’ai tout simplement oublié SA Liberté.

Ma fille m’a donné une leçon ce soir. Quand je pensais, par mes mots et mes actes de ces trois derniers jours, apprendre à mes enfants comment être un Homme Libre, un Citoyen solidaire et tolérant, j’ai tout simplement bafoué le premier de leurs Droits. La Liberté.

Oui, ma fille, tu es Libre. De ne pas comprendre. De ne pas être touchée plus que cela. Parce que ta génération est à ce point abreuvée d’informations morbides et glauques au possible que tu ne relèves même plus.

Oui, ma fille, tu es Libre. De ne pas vouloir « être Charlie ». De ne pas vouloir t’exprimer, de garder le silence.

Oui, ma fille, tu es Libre. Libre de préférer parler des dernières embrouilles entre camarades de classe, libre de savoir ce qu’on mange ce soir. Libre de rire, de blaguer.

Oui, ma fille, tu es Libre. Libre de me crier ton opposition. Libre d’hurler à mon visage que « ça » te soûle, que t’en as marre de n’entendre parler que de « ça », de ne voir que « ça » sur les chaînes info.

Libre tout simplement d’exprimer ce que tu penses, ou ne penses pas d’ailleurs, TOI. Avec tes convictions de jeune fille, ton inexpérience, ton innocence. Tu es libre et je l’avais oublié, moi qui pourtant, prône mes valeurs éducatives tolérantes et bienveillantes.
J’avais oublié et je te demande pardon.

J’ai compris que me lever pour défendre notre Liberté d’Expression, cela passe aussi par m’asseoir et écouter ma fille. Me taire et la laisser parler. D’elle. De futilités.
Ma Liberté s’arrête où commence celle des autres. Celle des mes enfants.

Oui, ils ont le Droit. De s’amuser comme des fous. De faire les zouaves sur le canapé et m’empêcher d’écouter BFM TV. De se disputer comme chiens et chats pour une couronne d’épiphanie. De râler parce qu’on ne regardera pas leur DVD ce soir.

Merci de me ramener à ma réalité.
Je vais recommencer à vivre. Pour vous mes enfants, qui êtes mon Passé, mon Présent et mon Avenir.
Je vais continuer à écrire sur vos enfantillages, sur vos rebellions, sur vos rires et vos émotions.

Vous êtes ma Liberté d’Expression.

Je vais retenir la Leçon.

#jesuischarlie

#jesuischarlie

Concentré d’Amour

bougies

« J’ai 10 ans ! J’sais bien qu’c’est pas vrai, mais j’ai 10 ans »

Hélas, malgré les belles paroles d’Alain Souchon, elle va bien avoir 10 ans.

Ma Championne. Ma Mini-Bulldozer. Ma 100 000 Volts.

10 ans bientôt qu’elle a remplit ma vie de bruits et de rires, de cris et de bouderies, de coups d’éclats et d’émotion pure.

Lors de ma grossesse, je n’imaginais pas à quel point cette petite brunette allait changer ma vie.

Perle avait 20 mois à la naissance de Championne, et était une petite fille placide et souriante, toujours discrète et paisible.
Je m’attendais à donner naissance à la même, une petite blonde joufflue et zen.

Championne a été tout le contraire. Brune et fine, nerveuse et accaparante. Toujours à 100 %.

100 % d’amour, tout de suite, pour tous. Je me souviens encore de son corps si frêle, si fragile, férocement accroché à mon cou comme un bébé primate s’accroche à sa mère. De ses mains qui nous cherchaient en permanence, pour toujours garder notre contact. De notre relation fusionnelle ses six premières années de vie, où nos cœurs battaient à l’unisson, mon âme et mon souffle rien que pour elle.

100 % d’énergie. Tout le temps. Jamais de répit avec celle que j’ai vite surnommé ma Mini-Bulldozer, tellement elle renversait tout sur son passage. Pourtant, elle a commencé par bien cacher son jeu, en ne marchant qu’à 17 mois, en restant frêle et petite longtemps.
Mais dès sa 2ème année, j’ai su que cette petite brindille recelait des accus inépuisables, toujours à courir, jamais sommeil, dévorant ses repas comme l’ogre qu’elle n’est pas.
Énergie qui cesse d’un coup d’un seul, le soir, quand enfin ses batteries sont vides et qu’en une fraction de seconde, elle plonge dans le sommeil.

100 % d’émotion. Voir 200 % tellement elle déborde. Impossible pour elle de dissimuler son émotion. Quand elle pleure devant une scène de film poignante. Quand elle n’arrive pas à retenir des larmes de joie, en écoutant son Coach la féliciter. Quand elle est fâchée, et Ô comme elle se fâche fort et souvent ! Quand elle est vexée, dépitée et qu’elle envoie tout valser, d’un coup de poing rageur.

100 % de stress. Pour elle, quand elle est dépassée, perdue, paniquée. Alors, je la vois ronger, mordre, arracher ongles et peaux de ses doigts si malmenés déjà. Et je vois aussi les cheveux qu’elle mâchouille jusqu’à les abîmer irrémédiablement. Et je la vois se tordre de douleur quand la migraine la submerge.
Pour nous souvent, quand nulle parole ni aucun acte n’arrive à la canaliser. Qu’elle déborde. Que son insolence prend le pas sur son éducation.

100 % de fierté, pour nous sa famille. Qui l’avons vue évoluer vitesse grand V. A l’école, où notre Mini-Bulldozer devient une image d’Epinal. Au football, milieu dans lequel nous baignons depuis 2 ans maintenant et où notre toute petite fille a tout d’une grande. Dans le quotidien, où ses réflexions nous étonnent, nous surprennent et nous font fondre d’amour.

L’amour. Oui, c’est bien cette émotion qui me fait frissonner lorsque je la contemple endormie, épuisée par une journée de folie. C’est l’Amour qui me tire un sourire quand je l’entends parler, parler et encore parler, sans jamais s’arrêter. C’est cet élan de tendresse quand je la vois se faire maternante et maladroite devant ses petites cousines. C’est ce sentiment puissant et inaliénable qui me fait frémir quand je la vois, ma Crevette, ma ToutePetite devenir une si grande fille.

Mon Amour, ma Championne, ne change pas d’un iota, je t’en conjure ! Dans les cris et le bruit, dans les rires et les câlins, crampons aux pieds et sourire aux lèvres, poing levé et ego surdimensionné, reste la même. Celle que j’aime.

lou2014