C’est trop injuste !

On dit de moi que je suis une mère cool, voire trop cool, parfois même on me traite de laxiste (ouh !! la vilaine mère qui n’a aucune autorité).

A contrario, je suis considérée par beaucoup comme une mère poule, qui couve mes petits d’un amour fusionnel et intense, ne les lâche pas d’un pas et tombe dans la déprime la plus profonde quand mes enfants s’éloignent de trop. (Ce qui n’est pas faux hé hé, j’avoue).

"Fais la poule, fais la poule ! Tu verras, tu s'ras plus cool ! "

« Fais la poule, fais la poule ! Tu verras, tu s’ras plus cool ! « 

Mais la réalité, ma vraie vie que peu de personnes ont le privilège de connaître, je suis beaucoup plus complexe que ça. Comme beaucoup, voir tous les parents du monde. Avant d’être parent, nous nous imaginions tous dans notre rôle, bienveillants et droits, offrant sécurité et amour à des enfants digne d’une image d’Épinal, proprets et obéissants.

Mais la réalité est tout autre n’est-ce-pas ? Comme le dit l’adage : « Avant j’avais des principes. Maintenant j’ai des enfants. »

Alors ma réalité aussi est bien différente de mes rêveries de nullipare. Mes anges blonds ne sont pas tout à faits de charmants angelots et la version « mère parfaite » que je m’étais forgée a disparu en fumée dès le terrible two de Prems.

Et non, je ne suis pas une mère trop cool, ni une maman poule collée-serrée à ma progéniture. Et c’est malheureusement mes enfants eux-mêmes qui en font les frais…

« C’est trop injuste ! » est une expression qui revient souvent à mes oreilles.

  • Quand je refuse que Deuz et sa copine aillent rejoindre une amie au village voisin, à pied.
  • Quand je refuse une énième partie de cartes à Perle, alors que l’heure du coucher est passée depuis longtemps.
  • Quand j’explique à ma Championne qu’elle est trop jeune pour se balader dans le village avec ses copains.
  • Quand j’appelle Fiston pour aller à la douche.
  • Quand je demande un coup de main pour les corvées quotidiennes.
  • Quand je ne veux pas qu’ils dorment dehors sous la tente, en Avril.
  • Quand je pique une gueulante devant l’état des chambres et que je leur demande de ranger.
  • etc, etc ……

Vous me direz, c’est chez tout le monde pareil.

Mais voilà, en ce moment, je ne sais plus trop où se situe la frontière entre ma « coolitude » naturelle et une autorité nécessaire à la protection de mes enfants. Je ne sais pas trop faire ça, moi, l’autorité. Ma patience a des limites « illimitées », leur indépendance et leur volonté de vivre leurs expériences ne me dérange pas, au contraire.
Mais il y a des fois où je m’aperçois que trop d’indépendance nuit à leur bien-être et au mien.

Ces jours-ci, c’est Championne qui me fait douter. Active, téméraire, elle aimerait être sans cesse par monts et par vaux avec ses potes, à filer sur son vélo à travers la campagne, à taper dans le ballon sur la place du village, à traîner ses shorts en bande loin de la maison.

Mais elle n’a « que » 9 ans (là, elle me dirait : « ouais, mais j’aurai 10 ans dans un mois !! »). Elle est toute petite. Innocente et ignorante des dangers.

Ignorante, quand j’apprends ce matin qu’elle s’amuse à faire du stop dans les rues du village. Heureusement, c’est un ami qui s’est arrêté et l’a sermonnée.

Inconséquente, quand elle ne rentre pas à l’heure dite et qu’il faut que j’aille la chercher.

Innocente, quand elle ne mesure pas le danger.

Outrée, quand je lui impose ma Loi.

Furieuse, quand elle se voit refuser ce que j’accorde à ses aînées.

Insolente, quand elle réplique méchamment à mes ordres.

J’sais pas pourquoi, mais j’la sens mal, son adolescence, à ma footballeuse en herbe :p

Et vous ? Vous gérez comment les demandes d’indépendance de vos enfants ?

Quand j’ai décidé de commencer à vivre pour moi.

vivreIl fût un temps où vivre me faisait peur, très peur.

Enfant, j’ai souffert d’anxiété sociale. Avec refus de sortir de chez moi. Avec tout ce que cela implique de souffrance pour moi, les autres, de suivi psy en internat psy.

Jeune adulte, j’ai fait semblant, pas trop mal ma foi. J’ai commencé à découvrir le monde.

J’ai aimé mais ça me faisait encore un peu (beaucoup) peur.

L’arrivée de mes enfants, successivement, m’a permis (donné l’excuse ?) de m’enfermer dans une routine rassurante, dans un espace restreint. Mais cet isolement a fini par me faire du mal, m’abîmer, m’aigrir. Dépression, tensions.

De longues années de morosité ont défilé, m’enfermant chaque jour un peu plus dans ce cercle vicieux : isolement – dépression – agression ..

Et puis, il n’y a pas si longtemps, le cours de ma vie a doucement changé, déviant son chemin de la morosité, pour emprunter celui de la libération.

Mon retour à la vie active, mon épanouissement professionnel, l’estime qu’ont pu me porter des amis, des collègues, des responsables, ont doucement changé le regard que je portais sur moi.

J’ai mûri, grandi, éclos !

Aujourd’hui, je me sens moi, droite dans mes baskets, sûre de mes choix, prête à les défendre, à savourer les bonheurs qui se présentent, à les provoquer même.

Je ne suis plus une petite fille. Je ne suis plus qu’une Mère, qu’une épouse.

Je suis MOI, toute entière dévouée à ma Tribu, mais consciente de ma liberté de faire, de vivre.

M’aimer, m’accepter, me cajoler. Prendre le plaisir où il m’attend. Pour moi seule.

Quand j’ai décidé de commencer à vivre pour moi, j’ai aussi à commencer à vivre avec les autres.