(Article initialement publié le 31 mai 2012)
C’est avec une joie non dissimulée que je rédige (enfin !!!) ce billet !
A quelques jours près, j’aurai pu en écrire un tout autre, intitulé « Trois mois ». Mais non, Perle n’aura pas passé trois mois loin de nous. Perle nous est rendue aujourd’hui, enfin..
Alors, en attendant son retour, ce soir, il est l’heure de dresser le bilan de ces « presque » 3 mois d’hospitalisation.
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Perle a été admise le 9 mars dernier au sein de l’Unité Pédopsychiatrique de l’hôpital de Grenoble, suite à de longues années d’angoisse sociale, l’handicapant fortement dans sa scolarité et dans son épanouissement personnel.
Nous l’avons confiée à l’équipe soignante l’esprit serein, confiants, sans douter une seconde que ce séjour tournerait au cauchemar.
Mais Perle a plongé, immédiatement. Submergée par ses angoisses, incapable, noyée dans sa panique, de prendre pied dans la réalité de l’Unité, notre fille dès les premiers jours de son hospitalisation, a sombré dans une profonde dépression paranoïaque, avec des manifestations violentes (crises d’hystérie, auto-mutilation, tentatives de fugues….).
Pendant une longue semaine, voire un peu plus, Perle a vécu l’enfer. Elle s’est repliée sur elle-même, sans qu’aucun soignant ne puisse communiquer avec elle (nous n’avions alors pas encore le droit de lui parler au téléphone, encore moins de la voir). Contenue plusieurs fois par jour en chambre d’isolement, il devient vite évident que Perle souffre également d’angoisses extrêmes dues à notre séparation et il est alors nécessaire de lui administrer un traitement médicamenteux de choc pour la soulager et la faire « revenir » dans la réalité.
Enfin, après presque quinze jours de cauchemar à n’avoir que les soignants, catastrophés et inquiets, en ligne, nous avons enfin l’autorisation de lui rendre visite, dans le cadre d’un entretien avec les psychiatres.
Et ce sera l’horreur. Découvrir mon enfant, ma douce, dans un état physique et psychologique profondément atteint. Aucun moyen de l’atteindre par la parole, par le geste. Elle est sans réaction. Le regard vide, halluciné, le souffle lourd et rauque, le corps voûté, lent et brisé. A ce moment-là, mon coeur de mère hurle et saigne. Le doute, qui nous a envahi dès les premiers signes de mal-être de notre fille, m’étreint à nouveau. Je n’ai qu’une envie, la ramener vite dans son cocon. La sensation horrible d’avoir précipité notre enfant dans la folie.
Mais, à la fin de cette visite, son regard s’anime, ses gestes se font câlins, le contact est de nouveau possible. Peut-être que de nous entendre sûrs de nous (en apparence, seulement, si tu savais, mon Amour, comme je pleurais si fort à l’intérieur), de nous voir accorder notre confiance à l’équipe médicale, de lui répéter qu’elle resterait au C.H.U. tant qu’il le serait nécessaire, a peut-être été un léger électrochoc.
Car dès notre départ, elle a repris pied.
Doucement, jour après jour, comme un animal sauvage blessé, elle a pu ainsi être « apprivoisée » par ses soignants. Le chemin a été long, très long.
Il aura fallu un mois et demi pour que Perle se sente suffisamment rassurée et confiante. Pour qu’elle puisse participer aux activités de groupe. Pour que ses moments de repli et de panique cèdent la place, et que s’épanouisse ma petite fille, blagueuse, souriante et enjouée.
Avec des progrès fulgurants et des reculs terrifiants.
Enfin, les premières permissions de sortie sont accordées, et Perle peut revenir à la maison pour les week-ends. Des moments magiques, étranges aussi. L’impression de découvrir une enfant étrangère, au comportement modifié par les traitements, au corps épuisé. Les retours au C.H.U sont difficiles, mais Perle s’accroche, décidée.
Arrive le moment d’envisager sa scolarité au sein de l’hôpital. Angoisse et panique refont leur apparition. Symptômes que la puce essaie tant bien que mal de cacher, de juguler, persuadée que ce retour à « l’école » signera la fin de son hospitalisation.
Mais les soignants ne précipitent rien, l’obligeant à dévoiler pas à pas ce qui la ronge, l’accompagnant dans sa « révélation ». Et Perle se métamorphose. D’une chrysalide empesée et figée, notre fille se transforme en magnifique Papillon. Libérée, elle s’épanouit chaque jour un peu plus, enfin consciente de sa valeur, goûtant la vie.
L’étape de la scolarité intra muros franchie, vient l’heure alors de reprendre contact avec sa vie d’ici. Rencontrer ses camarades, l’institutrice, se mêler au groupe. Encore une fois, ces étapes se feront tout doucement, préparées, accompagnées par les soignants et toute l’équipe de l’Unité. Et par nous, sa famille.
Et enfin !! oui, enfin, les psychiatres commencent à envisager la fin de l’hospitalisation. Nos coeurs s’allègent, l’espoir gonfle et nous porte chaque jour.
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Et ce jour est arrivé. C’est aujourd’hui. Dans quelques heures, ma fille rentrera enfin. Reprendre le cours de notre vie, tous ensemble, enfin.
Ce printemps 2012 aura été long, difficile, chaotique. Il aura vu des tonnes de larmes couler, des vies figées, des doutes et des espoirs s’envoler.
Mais à l’heure du bilan, ne reste que le bonheur intense de voir notre enfant transfigurée, prête à mordre la Vie à pleines dents. Le chemin vers l’apaisement sera encore long, nous le savons. Perle va être encore longtemps accompagnée, soutenue, par nous et par des professionnels.
Sa scolarité est aménagée, allégée pour ce mois de juin. Et à la rentrée de septembre, Perle bénéficiera d’une Auxiliaire de Vie Scolaire, pour l’aider dans son quotidien d’élève.
Mais en ce jeudi 31 mai, je ne retiens qu’une seule chose :
Ce soir, mon Doux, mon Tendre, mon Incroyable Amour sera là.